VEF Blog

Titre du blog : les deux côtés d'une carte postale
Auteur : manille
Date de création : 01-03-2005
 
posté le 23-11-2007 à 20:11:10

fait d'hiver

Janvier 2002. Route des 2 Alpes, la nuit.
Je me souviens encore de tout. De la fatigue et de la lassitude, après toutes ces heures passées dans la voiture. Du froid. De la neige. Oui, je me rappelle très bien ces flocons, gros comme des pièces de cinq francs, qui tombaient en tourbillonnant sur notre pare-brise. Toi et moi. Rien que toi et moi. Et une semaine de ski en perspective. Attends, je sors le plan de la station. C’est où déjà ? Place du Venosc. Ah oui, ça y est, j’ai trouvé. C’est bien, on n’est pas loin du centre. J’espère qu’on pourra louer des skis à proximité. Oui, moi aussi. Je crois qu’il y a beaucoup de boutiques dans cette station. Il y a une remontée près de l’immeuble ? J’ai l’impression, oui. Ah, voilà. Oui, il y a des oeufs. "Le diable". Cool, comme ça on n’aura pas... Aaaaaaah ! Attention, imbécile ! Sortie de nulle part, une voiture rate le virage. Coups de freins, crissements de pneus dans la neige, dérapages, tonneaux, bruits de tôle, arbres... Combien ? Dans quel ordre ? Et puis, enfin, le silence. Plus rien ne bouge. Combien de temps avant que je n’ouvre les yeux ? Cette douleur dans le bras, dans la tête... Je te cherche. Vincent. Ta porte est ouverte. Ton corps est étendu sur le sol. Vincent. Lentement, je me dégage de ma place. Vincent, réponds. Je suis à tes côtés. Je ne sais plus si j’ai marché ou rampé, si je murmure ou si je crie. Il y a tous ces bruits qui résonnent maintenant dans le silence glacial des montagnes. Et ces ombres. Leurs mots se bousculent dans ma tête et se mêlent au reste dans une infâme bouillie. Vincent. Je te regarde. Le sang sur ton front, sur tes joues, sur la neige. C’est comme si je savais déjà. Je prends ta main, je te regarde encore. Je crois que je pleure... Vincent ! Réponds ! Tu ne peux pas me laisser ! Et nos rêves, hein ? Et le Canada, la maison au bord du Saint-Laurent ? Vincent !! Ce dernier cri déchire la nuit, et des oiseaux s’envolent des arbres autour de nous en criant apeurés. On allait se fiancer... Les ombres tentent vainement de m’écarter de toi. Je voudrais t’embrasser, encore une fois. Et puis mourir aussi, puisque sans toi je n’ai plus de raison de vivre. Je caresse tes cheveux pendant de longues minutes. Puis j’entends les sirènes dans le lointain. On peut apercevoir la lueur bleue des gyrophares entre les arbres. A quoi bon ? Je pose ma tête sur ton torse et mets mes bras autour de toi. Je ferme les yeux. Il n’y a plus que toi, moi, et le froid.